En étudiant le comportement de fluides complexes en microgravité, des chercheurs ont ouvert la voie à de nouveaux de procédés de fabrication de pointe qui pourraient bénéficier à de nombreuses industries.
La microgravité qui règne à bord de la Station Spatiale Internationale ouvre la porte à des tas de travaux fascinants. En étudiant le comportement de la matière libérée des griffes de la gravitation, les chercheurs peuvent isoler de nombreux phénomènes qui les aident à comprendre le fonctionnement de notre monde.
Ces expériences ont déjà produit de beaux résultats dans des domaines divers et variés, de la biologie cellulaire à la mécanique des fluides en passant par la science des matériaux. Tout récemment, c’est l’université écossaise de Strathclyde, à Glasgow, qui s’est illustrée dans ce contexte. Grâce à une expérience menée à bord de l’ISS, une équipe de chercheurs a réussi à produire de nouveaux matériaux qui pourront bientôt être testés sur Terre.
Les fluides complexes, des substances fascinantes
Cette expérience a commencé avec des travaux sur les fluides complexes. Ce sont des substances où deux phases de la matière (solide, gaz, ou liquide) coexistent. Par exemple, il peut s’agir de liquides qui contiennent un grand nombre de particules solides ; le fluide complexe est alors appelé suspension. Il peut aussi contenir de minuscules gouttelettes d’un autre liquide, auquel cas on parle d’émulsion, ou une proportion importante de gaz (il s’agit alors d’une mousse).
Le terme de fluide complexe est utilisé pour marquer la différence avec les fluides dits simples, ou newtoniens. Ces derniers présentent une viscosité uniforme et constante ; ils se déversent donc de manière prévisible.
L’écoulement des fluides complexes, en revanche, peut varier en fonction de nombreux paramètres. Vous pouvez facilement en produire un exemple dans votre cuisine. Si vous mélangez de l’eau et de la fécule de maïs, vous obtenez un liquide où vous pouvez facilement immerger votre main. En revanche, plus cette mixture est soumise à une force importante, plus elle devient visqueuse, jusqu’à devenir presque complètement solide. Vous pourriez donc courir dessus à toute vitesse sans vous enfoncer.
Ce n’est qu’un exemple isolé ; les différents fluides complexes peuvent présenter des tas d’autres propriétés fascinantes. Ces spécificités sont à la base d’un champ de recherche très actif, car ces substances sont omniprésentes dans le monde qui nous entoure. Elles sont même indispensables à la vie ; le sang est un bon exemple de fluide complexe, puisqu’il est constitué de particules (les globules, plaquettes…) en suspension dans une phase liquide.
Une toute nouvelle façon de produire des matériaux avancés
Ils ont des tas d’applications concrètes, notamment dans l’alimentaire, l’industrie cosmétique, ou la biologie. L’équipe de Marcello Lappa, de son côté, a exploré leur intérêt en science des matériaux. En partant de simulations informatiques sophistiquées, les chercheurs ont postulé qu’il devrait être possible de produire de nouveaux matériaux à partir de fluides complexes en microgravité.
Ils ont donc tâché de vérifier cette théorie en envoyant une expérience appelée T-PAOLA à bord de la Station spatiale internationale. Sur place, les astronautes résidents ont conduit différents protocoles qui consistaient à chauffer, puis à faire vibrer différents types de fluides complexes.
Et apparemment, ils ont obtenu des résultats très prometteurs. « Nous avons démontré qu’en secouant un fluide complexe en l’absence de gravité, les particules peuvent faire des choses incroyables », explique Lappa. « Au lieu de se déplacer aléatoirement, elles peuvent former des amas et même des réseaux parfaits dont les propriétés peuvent être contrôlées avec une grande précision. »
Vers l’ère de la fabrication spatiale
L’équipe n’a pas encore publié l’étude associée. Il est donc impossible de savoir exactement de quel genre de matériau il s’agit pour le moment. Mais ce procédé pourrait tout de même revêtir une importance considérable à notre époque où l’industrie s’intéresse de plus en plus à la fabrication orbitale.
« La fabrication dans l’espace utilise les particularités de cet environnement pour créer des matériaux de bien meilleure qualité que sur Terre, et nous pourrions l’utiliser pour améliorer des tas de matériaux cruciaux pour notre santé et nos industries », explique le communiqué de l’université. Cela pourrait même conduire à la création de matériaux entièrement nouveaux, dont les propriétés ne pourraient tout simplement pas être reproduites sur Terre.
« Cela pourrait inclure des alliages métalliques caractérisés par une structure interne capable de supporter des contraintes bien spécifiques, des matériaux non métalliques capables de conduire de l’électricité, ou encore des protéines cristallines pour l’industrie pharmaceutique ».
Désormais, l’équipe de Lappa va tâcher de mettre cette méthode à disposition de l’industrie et des institutions de recherche. Il sera donc très intéressant de suivre les retombées de ces travaux, qui pourraient déboucher sur les premiers exemples de fabrication spatiale à grande échelle.
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